Vous ne rêvez pas. Les Bretons y croient dur comme fer. Pourtant c'est la Normandie que le Président a pris pour exemple Les bretons ne pinaillent pas eux, ils s'emballent => et nous on tergiverse... Loire-Atlantique en Bretagne ? Réunification. « Nantes est évidemment en Bretagne »Joël Cornette est auteur de plusieurs livres sur la Bretagne dont « Histoire de la Bretagne et des Bretons » (Le Seuil). Avec le recul de l’historien, il a répondu à nos questions sur Nantes et la Bretagne.
Oui ou non, Nantes est-elle en Bretagne ?
Evidemment, Nantes est en Bretagne. La question, en termes de longue durée historique, ne se pose même pas : la résidence des ducs de Bretagne, c’est bien Nantes; Anne de Bretagne demeurait à Nantes; le duc de Mercœur fit de Nantes, au temps de la Ligue, sa ville capitale. Et l’histoire même de la formation du territoire historique de la Bretagne, à partir du VI e siècle, inclut évidemment tout le sud de la Bretagne, dont Nantes.
Qu’est-ce qui a justifié que Nantes et la Loire-Atlantique aient été enlevées de la Bretagne ?
Nantes a été prélevée de la Bretagne, d’un simple coup de plume, sur une décision administrative et politique. En 1941, le régime de Vichy a enlevé la Loire-Inférieure (*) de la Bretagne, et l’a intégrée dans une nouvelle région dont le cœur était Angers. Une décision politique qui n’a
aucune réalité historique, ni économique. Même la Révolution, pourtant très « éradiquante », n’avait pas supprimé Nantes de la Bretagne au moment où elle a créé les cinq départements bretons.
Comment expliquez-vous que cette décision ait finalement été pérennisée ? Il faut d’abord préciser que, dans la durée historique, c’est une décision assez récente. La décision de Vichy a été pérennisée en 1955 quand ont été créées les « régions de programme », dont les Pays-de-la Loire, avec donc la Loire-Inférieure. Dans son livre « Géopolitique de la Bretagne » (1986), Michel Phlipponneau explique que
ce découpage aurait été réalisé par un haut fonctionnaire en un après-midi, sans aucune concertation. Les Pays-de-la-Loire n’ont pas de personnalité historique. C’est une décision purement politique et économique liée à la planification.
Comment se passaient avant 1941 les relations entre Nantes et Rennes ? Globalement, avant la Révolution, Rennes était avant tout la ville du parlement et de l’intendance. Nantes, ex-ville-résidence des ducs, était le siège de la chambre des comptes, principal organisme financier de la province. Et la principale ville commerciale, le poumon économique de la Bretagne, en quelque sorte. Entre les deux villes, cela se passait dans une cohabitation de fait.
Et si Nantes revient en Bretagne, comment voyez-vous les relations entre ces deux villes ?
Si Nantes revient, il y aurait, en somme, une Bretagne à deux têtes. Cela peut poser un problème de partage des fonctions et des pouvoirs. C’est vrai qu’il y a une ambiguïté, qui peut expliquer certaines oppositions à la réintégration de Nantes dans la Bretagne (y compris à Rennes, qui risque de perdre une part de ses prérogatives). Mais il faut distinguer l’aspect technocratique et le vécu des habitants qui, eux, se sentent Bretons, comme l’ont confirmé de nombreux sondages auprès des Nantais. Il y a une évidente désharmonie entre les deux. Joël Cornette vient de publier « Le Marquis et le Régent. Une conspiration bretonne à l’aube des Lumières » (Tallandier). * La Loire-Inférieure s’est appelée la Loire-Atlantique en 1957 .
Christian Troadec favorable à un référendumChristian Troadec, maire de Carhaix (29), qui se présente également comme « conseiller régional des 4/5 e de la Bretagne »,
est favorable à l’organisation d’un référendum portant sur la réunification de la Bretagne, « surtout si la loi l’impose ». Pourtant, à ses yeux,
« un simple décret républicain devrait avoir assez de poids pour défaire et annuler un décret vichyste ». Quant à savoir quelle serait la future capitale de la Bretagne réunifiée, il propose que
« Nantes conserve son statut de capitale historique, Rennes ses fonctions administratives, et que Carhaix, grâce à sa position centrale, devienne la capitale politique ». Alain Esnault. «La réunification, j’y crois»Alain Esnault est le président de l’association Produit en Bretagne, à laquelle adhèrent 200 entreprises des cinq départements de la Bretagne historique. La réunification, il y croit !
Etes-vous favorable à la réunification de la Bretagne ?
J’y crois vraiment et je l’espère. Je suis prêt à appuyer cette démarche sur le plan économique. Le monde actuel est en pleine évolution. Si nous restons enfermés dans nos carcans administratifs,
nous serons condamnés à l’immobilisme et nous irons au-devant de grandes déconvenues. Cette démarche va dans le sens de ce que Produit en Bretagne a mis en pratique il y a 15 ans : pour en faire partie,
il faut que les entreprises aient leur siège ou un centre de décision en Bretagne, mais dans la Bretagne historique, incluant la Loire-Atlantique. L’association de nos fortes valeurs
identitaires, économiques et culturelles, ont permis de consolider nos 200 entreprises. Des entreprises ligériennes ont élargi leur rayonnement en Bretagne et vice-versa. C’est en ayant une identité forte et consolidée que la Bretagne pourra se tourner vers l’extérieur et vers l’avenir.
Pensez-vous que l’arlésienne deviendra un jour réalité, et comment ? Les choses avancent dans les têtes, la Bretagne et la Loire-Atlantique ont beaucoup de points communs, les Nantais n’oublient pas que leur ville a été longtemps la capitale de la Bretagne.
Le détachement de la Loire-Atlantique de la Bretagne il y a 67 ans ne pèse pas lourd au regard de l’Histoire. Les Ligériens ont de la mémoire, dans leur tête ils sont Bretons. Dans un récent sondage que nous avons réalisé avec Produit en Bretagne, c’est en Loire-Atlantique que s’est manifestée la plus forte poussée pour s’identifier à notre démarche. Ce n’est pas un hasard si l’association m’a porté à sa présidence en 2006.
Je pense que la réunification peut voir le jour, mais pas de façon manichéenne, il ne faut pas que tout soit blanc ou noir. Il faudra inventer une méthode, y aller progressivement, sans précipiter les choses, en tenant compte des spécificités de chacun. Les deux parties ont tout à gagner économiquement au sein d’une grande région.
Propos recueillis par Yvon Corre. 03/12/2008.
source : http://www.letelegramme.com/gratuit/dossiers/44/reunification-nantes-est-evidemment-en-bretagne-20081203-4289738_1556229.php