Une petite communauté très bien intégrée. C'est ainsi qu'est décrite la communauté musulmane locale. Rencontre avec deux pratiquants, en plein jeûne.
En cette période de ramadan, Fatima, Algérienne, prie seule, dans sa maison à Pont-Hébert. Et pour cause : il n'y a pas de lieux de culte musulman à Saint-Lô. Et « Caen, c'est loin. » C'est sur Internet qu'elle a trouvé la date du début du mois du ramadan (le 24 septembre), les horaires du repas et des cinq prières. « Les heures ne sont pas les mêmes partout. Ici, par exemple, on mange avant les Caennais. Le soleil part plus vite. » Fatima se lève actuellement à 3 h pour prendre un café. Le soir, vers 20 h, il lui arrive de partager son dîner avec une Marocaine qu'elle a rencontré à l'atelier de formation de base. « En Algérie, on mange tous ensemble, en famille. Ici, c'est différent. C'est chacun de son côté. Et il n'y a pas beaucoup d'Arabes. » Elle prend tout de même soin de bien préparer ses plats, dès 17 h, avec des produits qu'elle a achetés lors de ses vacances en Algérie en juin. « C'est important pour moi de faire le ramadan. C'est bon pour la santé et pour penser aux gens qui sont pauvres. »
Le docteur Omar Tenouri n'est pas aussi strict sur les horaires. Son métier ne lui permet pas d'aller prier à Caen le vendredi soir, ni de manger dès le coucher du soleil. Chirurgien à l'hôpital Mémorial, il lui arrive de travailler jusqu'à 22 h. Le ventre vide. « On se lève vers 6 h pour manger. Et après, on doit attendre 19-20 h. Mais cela n'entrave en rien notre vie professionnelle », précise-t-il. Son fils aîné observe lui aussi le ramadan. L'autre jour, il a nagé de 18 h à 19 h 45, sans problème. « L'attention étant diminuée en journée, il travaille plus la nuit », concède son père. Son cadet, devenu pubère, a commencé cette année. Avec deux heures de sport dans la journée, il a ressenti l'autre jour le besoin de manger. Et l'a fait. Il devra donc jeûner un jour de plus une fois le mois terminé. Le 20 octobre, Omar partira fêter l'Aïd al-Fitr (fin du jeûne) au Maroc. D'autres ont carrément pris des vacances durant toute la période pour le faire au bled. « Mes fils, qui sont nés ici et le font ici, ne connaîtront jamais cette ambiance », confie Omar.
Les musulmans demeurent très discrets et peu nombreux à Saint-Lô, comparé au Nord-Cotentin, où est apparu l'islam dans les années 70 avec la venue des travailleurs des grands chantiers nucléaires de la Hague et de Flamanville. Il n'y a effectivement pas de quartier avec une forte proportion de population musulmane. Et par conséquent, pas de boucherie halal (1), ni de lieu de culte officiel. « Il n'y a pas de lieu identifié comme lieu de prières à Saint-Lô et la Ville n'a jamais été sollicitée pour cela », confirme Ugo Paris, directeur de cabinet du maire.
Concernant l'approvisionnement en viande halal, chacun se débrouille. Omar Tenouri commande en grandes quantités, avec d'autres médecins, des veaux et agneaux entiers chez un boucher saint-lois qui en achète en gros à Lisieux, pour dépanner. Fatima, elle, s'approvisionne dans un supermarché local. « Il y a de tout : du boeuf, des merguez... Avant, je me déplaçais jusqu'à Caen. J'étais obligée. Je ne mange que halal toute l'année et toute la vie ! »
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