Le député de Seine-Maritime Laurent Fabius a appelé mercredi le PS à conjurer "le risque d'une cassure entre une gauche molle vouée à la gestion et une gauche radicale centrée seulement sur la contestation" en optant pour un projet "clairement à gauche".
L'ancien Premier ministre a adressé mardi une note de cinq pages aux responsables du projet au PS (François Hollande, Henri Emmanuelli et Alain Bergounioux) exposant l'essentiel de ses propositions avant la rédaction définitive du projet pour 2007 d'ici le 7 juin.
Elles tiennent en quatre points: "fonder une République nouvelle, faire barrage aux méfaits de l'hyper-capitalisme financier, relancer et réorienter l'Europe pour parvenir à une croissance forte et durable, répondre à l'urgence sociale".
Afin d'enrayer "les dégâts du capitalisme financier", M. Fabius préconise entre autres d'instaurer une "obligation de soumettre toute OPA au vote de l'assemblée générale des salariés". Cette obligation pourrait aller jusqu'à un droit de veto, selon son entourage.
"Contre les délocalisations, il faut aussi qu'une loi soit prise pour empêcher des patrons voyous de tirer profit de la réputation d'une marque acquise en France tout en vidant de sa substance le site national de production", demande-t-il, dans une allusion aux déménagements de Kélian et Jourdan.
En matière sociale, l'ex-Premier ministre estime qu'il faut "se préparer vraiment au vieillissement de notre société". Selon lui, "il faut avoir le courage de dire que la prise en charge de la dépendance sous toutes ses formes (vieillissement et handicap) représentera de l'ordre d'1 point de CSG et que cette mesure est plus juste que la suppression d'un jour férié".
Le dirigeant socialiste souhaite aussi voir figurer dans le projet un "minimum retraite garanti d'au moins 1.000 euros", la progression du SMIC "à 1.500 euros" au cours de la prochaine législature et "la reconquête du capital (...) 100% public d'EDF et GDF".
Sur le logement, il demande "l'application effective d'un indice permettant de freiner la hausse des loyers" et la suppression des subventions d'équipement aux communes ne respectant pas le quota de 20% de logements sociaux. M. Fabius prône "la taxation du recours au travail précaire" et déclare que l'ambition socialiste doit être de "créer sur la législature environ 500.000 emplois sécurité formation".
En matière institutionnelle, il se prononce à nouveau pour "une République parlementaire" avec "un président arbitre et non plus monarque irresponsable".
M. Fabius ouvre des pistes pour financer ces réformes: suppression des "cadeaux fiscaux aux clientèles électorales" de la droite, suppression des aides à l'emploi "dont l'efficacité est faible ou nulle", "allègement" du budget de la Défense.
Jugeant qu'existe "le risque d'une cassure entre une gauche molle vouée à la gestion et une gauche radicale centrée seulement sur la contestation", le député de Seine-Maritime estime qu'il peut être enrayé si le projet du PS est "clairement à gauche". Il réfute donc à la fois le "blairisme" et le "réformisme de gauche" qu'il juge "sans ambition suffisante de transformation", et défend une alliance exclusive "avec des partis de gauche"