Les Cauchois sont visiblement « soulagés ». Ils viennent d'apprendre l'arrestation du Cheikh Dhaou Meskine par la sous-direction antiterroriste de la police judiciaire et l'Office central pour la répression de la grande délinquance financière. Un Cheikh, soupçonné d'association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste et de blanchiment d'argent (lire nos éditions d'hier).
Le maire de Saint-Laurent-en-Caux, Fernand Leforestier, ne tergiverse pas : « Clairement, j'ai pressenti un problème quand il a demandé un permis de construire pour la propriété de 4,5 hectares qu'il venait d'acheter 216.000 € au hameau du Mesnil. Les Renseignements généraux m'avaient averti. Je suis resté très sceptique quant au centre de vacances qu'il voulait créer. »
« L'époque du voile islamique »
Ainsi dès juillet 2003, l'élu a tenté de faire casser la vente de ce manoir datant du XVIIe siècle. Lui et ses huit cents administrés ont d'ailleurs réagi assez vite en organisant une réunion publique à l'automne 2003. Aujourd'hui le village tout entier, entre fantasmes et rumeurs, va jusqu'à évoquer l'éventualité d'un « camp d'entraînement d'Al-Qaida ».
Pourquoi une telle peur ?
« Nous ne sommes pas racistes, il ne s'agit pas de cela ! Toute cette histoire, dès le départ, nous a parue très louche. Pour ouvrir son centre de vacances, l'imam avait proposé trois structures. Il avait déjà des activités à Val-de-Saâne et il était en train d'acheter une autre propriété à Saâne-Saint-Just. C'était l'époque du voile islamique à l'école, le gouvernement voulait sans doute désengorger les banlieues. »
Le centre de vacances n'a jamais vu le jour. Ni à Saint-Laurent-en-Caux, ni à Val-de-Saâne, où le secrétaire général des imams de France louait un gîte depuis deux ou trois ans. « Même s'il n'était pas là en permanence, cet homme avait assez mauvaise réputation », confie l'actuelle propriétaire du village vacances Kéranne, situé rue Saint-Gilles, à Eurville. « Lorsque j'ai racheté cette propriété, j'ai décidé de ne plus faire d'exclusivité. » Raison pour laquelle le Cheikh a cherché à s'installer ailleurs.A Saâne-Saint-Just, notamment, où une exploitation agricole abandonnée de douze hectares lui a été cédée en 2004. Les habitants - 134 inscrits sur les listes électorales -, eux aussi ont eu du mal à accepter cette installation : « Il nous a pris par surprise et nous a mis devant le fait accompli. Oui, nous avons eu peur. Peur que la situation ne dégénère ».
« Parraine »-t-il le terrorisme islamiste comme les enquêteurs le soupçonnent ? Est-ce pour cette raison que les habitants du pays de Caux se méfient de cet homme, âgé de près de 50 ans ? Et que personne, en dehors du maire de Saint-Laurent, n'a jamais rencontré. Ou bien est-ce simplement parce qu'ils refusaient que cette personnalité influente de la communauté musulmane développe, chez eux, des activités de loisirs ?
Pour l'heure, la garde à vue du Cheikh - toujours présumé innocent - pourrait se prolonger jusqu'à ce soir.
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