A Sainte-Marie-du-Mont, la kommandantur est devenue un musée. La faute à des peintures murales conservées comme un trésor !
Des petits mots sont laissés sur le livre d'or. 'Il y a des petits musées, comme celui-là, qui valent bien des grands'. Jacky Lepesant en sourit avec son voisin d'en face, un certain Gilles Perrault, ravi de voir que l'ancienne demeure familiale devenu 'Musée de l'Occupation' intéresse autant de monde.
Commémoration du D-Day oblige : la presse internationale est aussi intriguée par ce drôle d’endroit. Tout récemment, le musée de Sainte-Marie-du-Mont a reçu la visite d’une équipe d’El Globo, la célèbre chaîne de TV brésilienne. Jacky Lepesant n’en revient pas : “C’est à peine croyable qu’on s’intéresse aussi à ma maison, tout là bas, à l’autre bout du monde !”
La faute à d’étonnantes fresques peintes à même les murs : elles datent de 1942, quand la grande maison bourgeoise, ancien hospice, abritait la Kommandantur locale. Au rez-de-chaussée, deux pièces ont été peintes à l’époque par les soldats de la Wehrmarcht : des tableaux réalistes qui racontent la vie sous l’occupation à Sainte-Marie-du-Mont. On y voit, notamment, le portrait d’officiers dont on imagine qu’il a été fait à l’occasion de l’anniversaire d’un d’entre eux.
Sous la tapisserie !
Il y a aussi la peinture colorée de trois Allemands en goguette, “les trois mousquetaires” et puis celle d’un orchestre militaire avec son chanteur et ses musiciens. “C’est ici, dans cette pièce, que les soldats se reposaient, jouaient aux cartes ou aux échecs et écoutaient de la musique”. Pendant très longtemps les peintures furent dissimulées et soigneusement conservées sous une tapisserie jusqu’au jour où… “Quand j’ai hérité de la maison de mes parents, je savais ce que je voulais en faire. Je voulais montrer ces fresques et raconter ce que fut l’histoire des lieux. Quand j’ai retiré le papier peint des murs, j’ai prié pour que les fresques soient toujours en état !”
Il aura fallu à Jacky Lepesant, enfant de Sainte-Marie-du-Mont, né quatre mois avant le D-Day, une bonne vingtaine d’années pour en arriver là : amasser toutes sortes d’objets, toutes sortes de pièces rares qui constituent aujourd’hui dans sa maison devenue musée une collection unique en son genre. Pendant vingt ans, l’ancien banquier saint-lois, aujourd’hui à la retraite, a bourlingué en Allemagne, en Autriche, en Pologne et en Tchécoslovaquie, notamment, pour amasser ce vrai trésor.
Gants de Pétain !
Il y a, dans chacune des pièces de la maison, plusieurs centaines d’objets de collection dont certains sont étonnants, voire exceptionnels : un vieux gramophone allemand qu’écoutaient les soldats à Stalingrad, les gants du maréchal Pétain, l’accordéon de Rommel, un poêle du camp d’Auchwitz, un flacon de cyanure ou bien encore une cartouche de Zyklon B, le gaz mortel utilisé dans les chambres à gaz. “Je l’ai récupéré sur un marché aux puces à Varsovie”, raconte, intarissable, le maître des lieux. “Je suis comme un passeur d’histoires. Cette maison a vécu de l’intérieur toute la période de l’occupation, de 1940 à 1944. Vingt soldats allemands y vivaient ”.
Il n’a jamais retrouvé la trace de celui qui a peint les murs. “Je rêve qu’un jour, un homme poussera la porte et me dira : j’ai fait tout cela”. En attendant, les murs parlent pour les absents… et l’histoire !
Alain Fergent
Pratique. Le musée de l’Occupation est situé place de l’Eglise, à Sainte-Marie-du-Mont. Ouvert du 1er avril au 30 septembre, tous les jours de 10 h à 12 h 30 et de 13 h 30 à 19 h. Infos au 02 33 71 57 14.
source la manche libre